CONVENTION DU 30 MARS 1853
Art. 1er. Le ministre des travaux publics, au nom de l'État, concède à MM. le comte de Morny, J. Masterman, le comte H. de Pourtalès-Gorgier, Matthew Uzielli, Calvet-Rogniat, Samuel Laing, le marquis de Latour-Maubourg et Hutchinson, 1° le chemin de fer de Clermont à Lempdes; 2° le chemin de fer de Montauban à la rivière du Lot, avec embranchement sur Marcillac; 3° le chemin de fer de Coutras à Périgueux; le tout aux clauses et conditions du titre 1er du cahier des charges arrêté par lui, à la date de ce jour, et ci-annexé.
2. Les concessionnaires s'engagent à exécuter entièrement à leurs frais, risques et périls, tous les travaux des chemins de fer qui font l'objet de la présente concession, et à se conformer, pour la construction et l'exploitation desdits chemins, aux clauses et conditions du titre 1er dudit cahier des charges.
3. Les actions de la compagnie ne pourront être négociées en France qu'après le versement des deux premiers cinquièmes du montant de chaque action.
4. Le ministre des travaux publics concède, en outre, aux susnommés, qui l'acceptent, les chemins de fer suivants : 1° la section du chemin de fer de Clermont-Ferrand à Montauban, comprise entre Lempdes et la rivière du Lot; 2° les deux sections du chemin de fer de Bordeaux à Lyon, comprises, l'une entre Saint-Étienne et le chemin de fer de Clermont-Ferrand à Montauban, l'autre entre ce dernier chemin et Périgueux; 3° le chemin de fer de Limoges à Agen; le tout aux clauses et conditions du titre 2 du cahier des charges ci-annexé.
5. La concession dont il s'agit dans l'article précédent est, dès à présent, obligatoire pour la compagnie concessionnaire. En ce qui concerne l'État, elle devra être régularisée dans un délai de cinq ans, au plus tard, en faveur de ladite compagnie. Dans la cas où, dans ledit délai, un décret spécial et une loi confirmant les engagements de l'État ne seraient pas intervenus, le présent article et l'article qui précède seraient considérés comme non avenus, et la concession formulée dans les art. 1, 2 et 3, resterait pure et simple.
Fait à Paris, les jour, mois et an que dessus. Le ministre des travaux publics, signé P. Magne. Signés comte de Morny, Masterman, marquis de Latour-Maubourg, M. Uzielli; pour M. J. Hutchinson, Masterman, comme se portant fort; comte Henri de Pourtalès-Gorgier, Calvet-Rogniat; pour Samuel Laing Masterman, comme se portant fort.
DÉCRET IMPÉRIAL DU 30 JUILLET 1853
portant autorisation de la Compagnie du Chemin de Fer Grand Central de France
Napoléon, etc., sur le rapport de notre ministre secrétaire d'État au département de l'agriculture, du commerce et des travaux publics; vu notre décret du 21 avril 1853, par lequel nous avons approuvé la convention passée, le 3 mars précédent, entre notre ministre des travaux publics et MM. le comte de Morny, J. Masterman, Samuel Laing, Hutchinson, le comte H. de Pourtalès-Gorgier, Matthew Uzielli, Calvet-Rogniat et marquis de Latour-Maubourg, est concédé aux susnommés les lignes de chemins de fer mentionnées dans ladite convention, sous les conditions déterminées par le cahier des charges annexé à ce décret; vu les articles 29 à 37, 40 à 45 du Code de commerce; notre conseil d'État entendu, avons décrété :
Art. 1er. La société anonyme formée à Paris sous la dénomination de Compagnie du chemin de fer grand central de France est autorisée. Sont approuvés les statuts de ladite société tels qu'ils sont centenus dans l'acte passé, le 28 juillet 1853, devant Me Dufour et son collègue, notaires à Paris, lequel acte restera annexé au présent décret.
2. La société sera soumise à toutes les obligations qui dérivent du cahier des charges du 30 mars 1853, annexé au décret du 21 avril suivant.
3. La présente autorisation pourra être révoquée, en cas de violation ou de non exécution des statuts approuvés, sans préjudice des droits des tiers.
4. La société sera tenue de remettre, tous les six mois, un extrait de son état de situation au ministère de l'agriculture, du commerce et des travaux publics, aux préfets des départements de la Gironde, de la Dordogne, de Lot-et-Garonne, de Tarn-et-Garonne, de la Haute-Vienne, de la Corrèze, de l'Aveyron, du Cantal, du Puy-de-Dôme, de la Haute-Loire, de la Loire et du Rhône, au préfet de police, à la chambre de commerce et au greffe du tribunal de commerce des villes traversées par les chemins de fer concédés.
5. Notre ministre de l'agriculture et du commerce et des travaux publics (M. Magne) est chargé, etc.
CAHIER DES CHARGES
ANNEXÉ À LA CONVENTION DU 30 MARS 1853, APPROUVÉE PAR DÉCRET LE 21 AVRIL 1853
TITRE Ier. CLAUSES RELATIVES AUX CHEMINS DE FER DE CLERMONT-FERRAND À LEMPDES, DE MONTAUBAN AU LOT, AVEC EMBRANCHEMENT SUR MARCILLAC, ET DE COUTRAS À PÉRIGUEUX.
1. La compagnie s'engage à exécuter, à ses frais, risques et périls, tous les travaux des chemins de fer de Clermont-Ferrand à Lempdes, de Montauban au Lot, avec embranchement sur Marcillac, et de Coutras à Périgueux, et à les terminer dans un délai de quatre années. Ce délai courra à dater du décret de concession.
2. Le chemin de fer de Clermont-Ferrand à Lempdes s'embrenchera à Clermont sur le chemin de fer de Paris à Clermont et se dirigera vers Lempdes, en passant à ou près Issoire, et traversant le bassin houiller de Brassac, suivant le tracé qui sera déterminé par l'administration. Le chemin de fer de Montauban au Lot s'embranchera à Montauban sur le chemin de fer de Bordeaux à Cette; il se dirigera sur Villefranche et se portera sur le bassin houiller d'Aubin, qu'il traversera, suivant le tracé qui sera déterminé par l'administration, pour arriver sur la rive gauche du Lot. Un embranchement, destiné à desservir les usines d'Aubin et de Decazeville, se détachera de la ligne principale en un point qui sera déterminé par l'administration et viendra aboutir à ou près Marcillac. Le chemin de fer de Coutras à Périgueux s'embranchera sur le chemin de fer de Paris à Bordeaux à ou près Coutras et se dirigera, en suivant la vallée de l'Isle, sur Périgueux, où il aboutira un point qui sera déterminé par l'administration.
3. À dater de l'homologation de la convention, la compagnie devra soumettre à l'administration supérieure, de deux mois en deux mois, et par section de vingt kilomètres au moins, rapportés sur un plan à l'échelle d'un cinq millième, les tracés définitifs des chemins de fer, en se conformant aux indications des articles précédents. Elle indiquera sur ce plan, sans préjudice des dispositions de l'article 4 ci-après, la position et le tracé des gares de stationnement et d'évitement, ainsi que les lieux de chargement et de déchargement. À ce même plan devront être joints un profil en long suivant l'axe du chemin de fer, un certain nombre de profils en travers, le tableau des pentes et des rampes, et un devis explicatif comprenant la description des ouvrages. La compagnie sera autorisée à prendre copie des plans, nivellements et devis dressés aux frais de l'État. En cours d'exécution, la compagnie aura la faculté de proposer les modifications qu'elle pourrait juger utile d'introduire; mais ces modifications ne pourront être exécutées que moyennant l'approbation préalable et le consentement formel de l'administration supérieure.
4. Les terrains seront acquis et les travaux d'art seront exécutés immédiatement pour deux voies; les terrassements pourront être exécutés et les rails pourront être posés pour une voie seulement, sauf l'établissement d'un certain nombre de gares d'évitement. La compagnie concessionnaire sera tenue, d'ailleurs, d'établir la deuxième voie sur chacune des lignes concédées, lorsque la recette brute s'élévera à dix huit mille francs (18,000 fr.) par kilomètre. L'excédant de largeur acquis par la compagnie concessionnaire ne pourra être employé qu'à l'établissement de cette seconde voie.
5. La largeur du chemin de fer en couronne est fixée, pour une voie, à quatre mètres cinquante centimètres (4 m. 50 c.). Sur les points où deux voies seront établies, la largeur est fixée à huit mètres trente centimètres (8 m. 30 c.) en couronne dans les parties en levée, et à sept mètres quarante centimètres (7 m. 40 c.) dans les tranchées et les rochers, entre les parapets des ponts et dans les souterrains. La largeur de la voie entre les bords intérieurs des rails devra être d'un mètre quarante quatre centimètres à un mètre quarante cinq centimètres. La distance entre les deux voies, dans les parties où elles seront établies, sera au moins égale à un mètre quatre-vingts centimètres, mesurée entre les faces extérieures des rails de chaque voie. La largeur des accotements ou, en d'autres termes, la largeur entre les faces extérieures des rails extrêmes et l'arête extérieure du chemin, sera au moins égale à un mètre cinquante centimètres (1 m. 50 c.) dans les parties en levée, et à un mètre (1 m.) dans les tranchées et les rochers, entre les parapets des ponts et dans les souterrains.
6. Les alignements devront se rattacher suivant les courbes dont le rayon minimum est fixé à trois cents mètres (300 m.); et, dans le cas de ce rayon minimum, les raccordements devront, autant que possible, s'opérer sur des paliers horizontaux. Le maximum des pentes et rampes du tracé n'excédera pas dix millimètres par mètre; il pourra cependant être porté à douze millimètres par mètre dans quelques cas rares et exceptionnels, et avec l'approbation spéciale de l'administration. La compagnie aura la faculté de proposer aux dispositions de cet article, comme à celles de l'article précédent, les modifications dont l'expérience pourra indiquer l'utilité ou la convenance; mais ce modifications ne pourront être exécutées que moyennant l'approbation préalable et le consentement formel de l'administration supèrieure.
7. Le nombre, l'étendue et l'emplacement des gares d'évitement seront déterminés par l'administration, la compagnie préalablement entendue. Indépendemment des gares d'évitement, la compagnie sera tenue d'établir, pour le service des localités traversées par le chemin de fer ou situées dans le voisinage de ce chemin, des gares ou ports secs destinés tant aux stationnements qu'aux chargements et aux déchargements, dont le nombre, l'emplacement et la surface seront déterminés par l'administration après enquête préalable.
8. À moins d'obstacles locaux, dont l'appréciation appartiendra à l'administration, le chemin de fer, à la rencontre des routes nationales ou départementales, devra passer soit au-dessus, soit au-dessous de ces routes. Les croisements de niveau seront tolérés pour les chemins vicinaux, ruraux ou particuliers.
9. Lorsque le chemin de fer devra passer au-dessus d’une route nationale ou départementale ou d’un chemin vicinal, l’ouverture du pont ne sera pas moindre de huit mètres (8 m.) pour la route nationale, de sept mètres (7 m.) pour la route départementale, de cinq mètres (5 m.) pour le chemin vicinal de grande communication, et de quatre mètres (4 m.) pour le simple chemin vicinal. La hauteur sous clef, à partir de la chaussée de la route, sera de 5 mètres (5 m.) au moins; pour les ponts à charpente, la hauteur sous poutre sera de quatre mètres trente centimètres (4 m. 30 c.) au moins ; la largeur entre les parapets sera au moins de huit mètres (8 m.), et la hauteur de ces parapets de quatre-vingts centimètres (80 c.) au moins.
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CAHIER DES CHARGES
ANNEXÉ À LA CONVENTION DU 30 MARS 1853, APPROUVÉE PAR DÉCRET LE 21 AVRIL 1853
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20. La compagnie pourra employer dans la construction du chemin de fer les matériaux communément en usage dans les travaux publics de la localité; toutefois, les têtes de voûte, les angles, socles, couronnements, extrémités de radiers seront, autant que possible, en pierre de taille. Dans les localités où il n'existera pas de pierre de taille, l'emploi de la brique ou du moëllon dit d'appareil sera toléré. Les rails et autres éléments constitutifs de la voie de fer devront être de bonne qualité et propres à remplir leur destination. Le poids des rails sera au moins de trente cinq kilogrammes par mètre courant sur les voies de circulation, et trente kilogrammes dans le cas où la compagnie voudrait poser des rails sur longrines.
21. Tous les terrains destinés à servir d’emplacement au chemin de fer et à toutes ses dépendances, telles que les gares de croisement et de stationnement, lieux de chargement et de déchargement, ainsi qu’au rétablissement des communications déplacées ou interrompues et de nouveaux lits des cours d’eau, seront achetés et payés par la compagnie. La compagnie est substituée aux droits comme elle est soumise à toutes les obligations qui dérivent pour l’administration de la loi du 3 mai 1841 [1].
22. L’entreprise étant d’utilité publique, la compagnie est investie de tous les droits que les lois et règlements confèrent à l’administration elle-même pour les travaux de l’État. Elle pourra, en conséquence, se procurer par les mêmes voies les matériaux de remblai et d’empierrement nécessaires à la construction et à l’entretien du chemin de fer; elle jouira, tant pour l’extraction que pour le transport et le dépôt des terres et matériaux, des privilèges accordés par les mêmes lois et règlements aux entrepreneurs de travaux publics, à la charge pour elle d’indemniser à l’amiable les propriétaires des terrains endommagés, ou, en cas de non accord, d’après les règlements arrêtés par les conseils de préfecture, sauf recours au conseil d’État, sans que, dans aucun cas, elle puisse exercer de recours à cet égard contre l’administration.
23. Les indemnités pour occupation temporaire ou détérioration de terrain, pour chômage, modification ou destruction d’usines, pour tout dommage quelconque résultant des travaux, seront supportés et payés par la compagnie.
24. Les ouvrages qui seraient situés dans le rayon des places et dans la zone des servitudes, et qui, aux termes des règlements actuels, devraient être exécutés par les officiers du génie militaire, le seront par les agents de la compagnie, mais sous le contrôle et la surveillance de ces officiers, et conformément aux projets particuliers qui auront été préalablement approuvés par les ministres de la guerre et des travaux publics. La même faculté pourra être accordée, par exception, pour les travaux sur le terrain militaire occupé par les fortifications, toutes les fois que le ministre de la guerre jugera qu’il n’en peut résulter aucun inconvénient pour la défense.
25. Si la ligne de chemin de fer traverse un sol déjà concédé pour l’exploitation d’une mine, l’administration déterminera les mesures à prendre pour que l’établissement du chemin de fer ne nuise pas à l’exploitation de la mine, et réciproquement, pour que, le cas échéant, l’exploitation de la mine ne compromette pas l’existence du chemin de fer. Les travaux de consolidation à faire dans l’intérieur de la mine, à raison de la traversée du chemin de fer, et tous les dommages résultant de cette traversée pour les concessionnaires de la mine, seront à la charge de la compagnie.
26. Si le chemin de fer doit s’étendre sur des terrains renfermant des carrières, ou les traverser souterrainement, il ne pourra être livré à la circulation avant que les excavations qui pourraient en compromettre la solidité n’aient été remblayées ou consolidées. L’administration déterminera la nature et l’étendue des travaux qu’il conviendra d’entreprendre à cet effet, et qui seront d’ailleurs exécutés par les soins et aux frais de la compagnie de chemin de fer.
27. Pendant la durée des travaux qu’elle effectuera par des moyens et des agents à son choix, la compagnie sera soumise au contrôle et à la surveillance de l’administration. Ce contrôle et cette surveillance auront pour objet d’empêcher la compagnie de s’écarter des dispositions qui lui sont prescrites par le présent cahier des charges, et de vérifier les éléments des comptes de dépenses dont l’intérêt est garanti par l’État.
28. A mesure que les travaux seront terminés sur des parties de chemin de fer, de manière que ces parties puissent être livrées à la circulation, il sera procédé à leur réception par un ou plusieurs commissaires que l’administration désignera ; le procès verbal du ou des commissaires délégués ne sera valable qu’après homologation par l’administration supérieure. Après cette homologation, la compagnie pourra mettre en service lesdites parties du chemin de fer et y percevoir les droits de péage et les prix de transport ci-après déterminés. Toutefois, ces réceptions partielles ne deviendront définitives que par la réception générale et définitive du chemin de fer.
29. Après l’achèvement total des travaux, la compagnie fera faire à ses frais un bornage contradictoire et un plan cadastral du chemin de fer et des ses dépendances; elle fera dresser, également à ses frais et contradictoirement avec l’administration, un état descriptif des ponts, aqueducs et autres ouvrages d’art qui auront été établis conformément aux conditions du présent cahier des charges. Une expédition dûment certifiée des procès-verbaux de bornage, du plan cadastral et de l’état descriptif sera déposée, aux frais de la compagnie, dans les archives de l’administration des ponts et chaussées.
30. Le chemin de fer et toutes ses dépendances seront constamment entretenus en bon état, et de manière que la circulation soit toujours facile et sûre. L’état dudit chemin et de ses dépendances sera reconnu annuellement, et plus souvent, en cas d’urgence ou d’accidents, par un ou plusieurs commissaires que désignera l’administration. Les frais d’entretien et ceux de réparation, soit ordinaires, soit extraordinaires, resteront entièrement à la charge de la compagnie. Pour ce qui concerne cet entretien et ces réparations, la compagnie demeure soumise au contrôle et à la surveillance de l’administration. Si le chemin de fer, une fois achevé, n’est pas constamment entretenu en bon état, il y sera pourvu d’office, à la diligence de l’administration et aux frais de la compagnie. Le montant des avances faites sera recouvré par des rôles que le préfet du département rendra exécutoire.
31. Les frais de visite, de surveillance et de réception des travaux seront supportés par la compagnie. Ces frais seront imputés sur la somme que la compagnie est tenue de verser annuellement à la caisse centrale du trésor, conformément à l’article 58 ci-après. En cas de non versement dans le délai fixé, le préfet rendra un rôle exécutoire, et le montant en sera recouvré comme en matière de contributions publiques.
32. Si, dans le délai d’une année à dater de l’homologation, la compagnie ne s’est pas mise en mesure de commencer les travaux qu’elle est chargée d’exécuter, et si elle ne les a pas effectivement commencés, elle sera déchue de plein droit de la concession du chemin de fer, et sans qu’il y ait lieu à aucune mise en demeure, ni notification quelconque. Dans le cas de déchéance prévu au paragraphe précédent, la somme de deux millions de francs, déposée, ainsi qu’il sera dit à l’article 62 à titre de cautionnement, deviendra propriété de l’État et restera acquise au trésor public. Les travaux une fois commencés, le cautionnement sera rendu par cinquième et proportionnellement à l’avancement des travaux.
33. Faute pour la compagnie d’avoir entièrement exécuté et terminé les travaux à sa charge dans les délais fixés, faute aussi par elle d’avoir rempli les diverses obligations qui lui sont imposées par le présent cahier des charges, elle encourra la déchéance, et il sera pourvu à la continuation et à l’achèvement des travaux, comme à l’exécution des autres engagements contractés par la compagnie, par le moyen d’une adjudication qu’on ouvrira sur les clauses du présent cahier des charges, et sur une mise à prix des ouvrages déjà construits, des matériaux approvisionnés et des portions de chemin déjà mises en exploitation. La compagnie évincée recevra de la nouvelle compagnie la valeur que la nouvelle adjudication aura déterminée. La partie non encore restituée du cautionnement deviendra propriété de l’État. Si l’adjudication ouverte n’amène aucun résultat, une seconde adjudication sera tentée sur les mêmes bases, après un délai de six mois, et, si cette seconde tentative reste également sans résultat, la compagnie sera définitivement déchue de tous droits de concession, et les portions de chemin déjà exécutées, ou qui serait mises en exploitation, deviendront immédiatement la propriété de l’État. En cas d’interruption partielle ou totale de l’exploitation du chemin de fer, l’administration prendra immédiatement aux frais et risques de la compagnie, les mesures nécessaires pour assurer provisoirement le service. Si, dans les trois mois de l’organisation du service provisoire, la compagnie n’a pas valablement justifié des moyens de reprendre et de continuer l’exploitation, et, si elle ne l’a pas effectivement reprise, la déchéance pourra être prononcée par le ministre des travaux publics. Les dispositions de l’article qui précède, ainsi que du présent article, ne seront point applicables au cas où le retard ou la cessation des travaux, ou l’interruption de l’exploitation, proviendrait de force majeure régulièrement constatée.
34. La contribution foncière sera établie en raison de la surface des terrains occupés par le chemin de fer et par ses dépendances; la cote en sera calculée, comme pour les canaux, conformément à la loi du 25 avril 1803. Les bâtiments et magasins dépendants de l’exploitation du chemin de fer seront assimilés aux propriétés bâties dans la localité, et la compagnie devra également payer toutes les contributions auxquelles ils pourront être soumis. L’impôt dû au trésor sur le prix des places ne sera prélevé que sur la partie du tarif correspondant aux prix du transport de voyageurs.
35. Des règlements d’administration publique, rendus après que la compagnie aura été entendue, détermineront les mesures et les dispositions nécessaires pour assurer la police, l’exploitation et la conservation du chemin de fer et des ouvrages qui en dépendent. Toutes les dépenses qu’entraînera l’exécution de ces mesures et de ces dispositions resteront à la charge de la compagnie. La compagnie sera tenue de soumettre à l’approbation de l’administration les règlements de toute nature qu’elle fera pour le service et l’exploitation du chemin de fer. Les règlements dont il s’agit dans les deux paragraphes précédents seront obligatoires pour la compagnie et pour toutes celles qui obtiendraient ultérieurement l’autorisation d’établir des lignes de chemin de fer d’embranchement ou de prolongement, et en général, pour toutes les personnes qui emprunteraient l’usage du chemin de fer.
36. Les machines locomotives seront construites sur les meilleurs modèles connus; elles devront consumer leur fumée et devront satisfaire, d'ailleurs, à toutes les conditions prescrites ou à prescrire par le gouvernement pour la mise en circulation de cette classe de machines. Les voitures de voyageurs devront également être du meilleur modèle; elles seront toutes suspendues sur ressorts et garnies de banquettes. il y en aura de trois classes au moins. Les voitures de première classe seront couvertes, garnies et fermées à glaces; celle de deuxième classe seront couvertes, fermées à glaces et auront des banquettes rembourrées; celles de troisième classe seront couvertes et fermées à vitres. Les places seront numérotées dans les voitures de troisième classe comme dans celles de première et de seconde classe. Les voitures de toutes les classes devront remplir les conditions réglées ou à régler pour les voitures qui servent au transport des personnes. Les wagons de marchandises et de bestiaux et les plates-formes seront de bonne et solide construction.
37. Le chemin de fer sera clôturé et séparé des propriétés particulières par des murs ou par des haies, ou des poteaux avec lisses. Les barrières fermant les communications particulières s’ouvriront sur les terres et non sur le chemin de fer.
38. Pour indemniser la compagnie des travaux et dépenses qu’elle s’engage à faire par le présent cahier des charges, et sous la condition expresse qu’elle en remplira exactement toutes les obligations, le gouvernement lui accorde, pour un laps de quatre-vingt dix neuf années, à dater de l’époque fixée pour l’achèvement des travaux de toutes les lignes formant l’objet de la présente concession, l’autorisation de percevoir les droits de péage et les prix de transport ci-après déterminés. Il est expressément entendu que les prix de transport ne seront dus à la compagnie qu’autant qu’elle effectuerait elle-même ce transport à ses frais et par ses propres moyens. La perception aura lieu par kilomètre, sans égard aux fractions de distance; ainsi un kilomètre entamé sera payé comme s’il avait été parcouru. Néanmoins, pour toute distance parcourue moindre de six kilomètres, le droit sera perçu comme pour six kilomètres entiers. Le poids de la tonne est de mille kilogrammes; les fractions de poids ne seront comptées que par centième de tonne : ainsi tout poids compris entre zéro et dix kilogrammes paiera pour dix kilogrammes ; entre dix et vingt kilogrammes, il paiera comme vingt kilogrammes ; entre vingt et trente, il paiera comme trente kilogrammes, etc. L’administration déterminera, par des règlements spéciaux, la compagnie entendue, le minimum et le maximum de vitesse des convois de voyageurs et de marchandises et des convois spéciaux des postes, ainsi que la durée du trajet. Dans chaque convoi, la compagnie aura la faculté de placer des voitures spéciales, pour lesquelles les prix seront réglés par l’administration, sur la proposition de la compagnie; mais il est expressément stipulé que le nombre des places à donner dans ces voitures n’excédera pas le cinquième du nombre total des places du convoi. À moins d’autorisation spéciale et révocable de l’administration, tout convoi régulier de voyageurs devra contenir, en quantité suffisante, des voitures de toute classe destinées aux personnes qui se présenteront dans les bureaux du chemin de fer. Les marchandises qui, sur la demande des expéditeurs, seraient transportées avec la vitesse des voyageurs, paieront à raison de trente six centimes la tonne. Les chevaux et bestiaux, dans le cas indiqué au paragraphe précédent, paieront le double des taxes portées au tarif. Dans le cas où la compagnie jugerait convenable, soit pour le parcours total, soit pour les parcours partiels de la voie de fer, d’abaisser en-dessous des limites déterminées par le tarif les taxes qu’elle est autorisée à percevoir, les taxes abaissées ne pourront être relevées qu’après un délai de trois mois au moins pour les voyageurs, et d’un an pour les marchandises. Tous changements apportés dans les tarifs seront annoncés un mois d’avance par des affiches. Ils devront, d’ailleurs, être homologués par des décisions de l’administration supérieure, prises sur la proposition de la compagnie, et rendues exécutoires dans chaque département par des arrêtés du préfet. La perception des taxes devra se faire par la compagnie indistinctement, et sans aucune faveur. Dans le cas où la compagnie aurait accordé à un ou plusieurs expéditeurs une réduction sur l’un des prix portés au tarif, avant de la mettre à exécution, elle devra en donner connaissance à l’administration, et celle-ci aura le doit de déclarer la réduction, une fois consentie, obligatoire vis-à-vis de tous les expéditeurs et applicables à tous les articles d’une même nature. La taxe ainsi réduite ne pourra, comme pour les autres réductions, être relevée avant un délai d’un an. Les réductions ou remises accordées à des indigents ne pourront, dans aucun cas, donner lieu à l’application de la disposition qui précède. En cas d’abaissement des tarifs, la réduction portera proportionnellement sur le péage et le transport.
TARIF. | PRIX | ||
---|---|---|---|
(Par tête et par kilomètre.) Voyageurs, non compris l'impôt du dixième sur le prix des places. |
de péage. | de transport | Total. |
fr. c. | fr. c. | fr. c. | |
Voitures couvertes, garnies et fermées à glaces (1re classe). | 0 067 | 0 033 | 0 100 |
Voitures couvertes fermées à glaces et à banquettes rembourrées (2e classe). | 0 050 | 0 025 | 0 075 |
Voitures couvertes et fermées à vitres (3e classe). | 0 037 | 0 018 | 0 055 |
TARIF. |
PRIX | ||
(Par tonne et par kilomètre.) | de péage. | de transport | Total. |
Bestiaux. | fr. c. | fr. c. | fr. c. |
Bœufs, vaches, taureaux, chevaux, mulets, bêtes de trait. | 0 07 | 003 | 0 10 |
Veaux et porcs. | 0 025 | 0 015 | 0 04 |
Poissons. | |||
Huîtres et poissons frais, à la vitesse des voyageurs. | 0 30 | 0 20 | 0 50 |
Marchandises. | |||
Première classe. — Fontes moulées, fer et plomb ouvrés,cuivre et autres métaux ouvrés ou non, vinaigre, vins, boissons, spiritueux, huiles, cotons, lainages, bois de menuiserie, de teinture et autres bois exotiques, sucre, café, drogues, épiceries, denrées coloniales, et objets manufacturés. | 0 10 | 0 08 | 0 18 |
Deuxième classe. — Blés, grains, farines, sels, chaux et plâtre, minerais, coke, charbon de bois, bois à brûler, (dit de corde), perches, chevrons, planches, madriers, bois de charpente, marbres en blocs, pierres de taille, bitumes, fontes brutes, fer en barres ou en feuilles, plomb an saumons. | 0 09 | 0 07 | 0 16 |
Troisième classe. — Pierres à chaux et à plâtre, moellons, meulières, cailloux, sable, argile, tuiles, briques, ardoises, pavés et matériaux de toute espèce pour la construction et la réparation des routes. | 0 08 | 0 06 | 0 14 |
Houille, marnes, cendres, fumiers et engrais. | 0 06 | 0 04 | 0 10 |
Objets divers. | |||
Wagon et chariot destinés au transport sur le chemin de fer, y passant à vide. | 0 06 | 0 06 | 0 12 |
Toute autre voiture destinée au transport sur le chemin de fer, y passant à vide, et machine locomotive ne traînant pas de convoi. | 0 15 | 0 10 | 0 25 |
(Les machines locomotives seront considérées et taxées comme ne remorquant pas de convoi, lorsque le convoi remorqué, soit en voyageurs, soit en marchandises, ne comportera pas un péage au moins égal à celui qui serait perçu sur une machine locomotive avec allége, marchant sans traîner.) | |||
TARIF. |
PRIX | ||
(Par pièce et par kilomètre.) | de péage. | de transport | Total. |
fr. c. | fr. c. | fr. c. | |
Voiture à deux ou quatre roues, à un fond et à une seule banquette dans l'intérieur. | 0 15 | 0 10 | 0 25 |
Voiture à quatre roues, à deux fonds, et à deux banquettes dans l'intérieur. | 0 18 | 0 14 | 0 32 |
(Le tarif sera double si le transport a lieu à la vitesse des voyageurs. Dans ce cas, deux personnes pourront, sans supplément de tarif, voyager dans les voitures à une banquette, et trois, dans les voitures à deux banquettes. Les voyageurs excédant ce nombre paieront le prix des places de deuxième classe.) |
39. Tout voyageur dont le bagage ne pésera pas plus de trente kilogrammes n’aura à payer, pour le port de ce bagage, aucun supplément de prix de sa place.
40. Les denrées, marchandises, effets, animaux et autres objets non désignés dans le tarif précédent seront rangés, pour les droits à percevoir, dans les classes avec lesquelles ils auraient le plus d’analogie. Les assimilations de classes pourront être provisoirement réglées par la compagnie; elles seront soumises immédiatement à l’administration, qui prononcera définitivement.
41. Les droits de péage et les prix de transport déterminés au tarif précédent ne sont point applicables, 1° à toute voiture pesant, avec son chargement, plus de quatre mille cinq cents kilogrammes (4,500 kil.); 2° à toute masse indivisible pesant plus de trois mille kilogrammes (3,000 kil.). Néanmoins, la compagnie ne pourra se refuser ni à transporter les masses indivisibles pesant trois mille à cinq mille kilogrammes, ni à laisser circuler toute voiture qui, avec son chargement, pèserait de quatre mille cinq cents à huit mille kilogrammes; mais les droits de péage et les prix de transport seront augmentés de moitié. La compagnie ne pourra être contrainte à transporter les masses indivisibles pesant plus de cinq mille kilogrammes (5,000 kil.), ni à laisser circuler les voitures, autres que les machines locomotives, qui, chargement compris, pèserait plus de huit mille kilogrammes (8,000 kil.). Si, nonobstant la disposition qui précède, la compagnie transporte les masses indivisibles pesant plus de cinq mille kilogrammes et laisse circuler les voitures, autres que les machines locomotives, qui, chargement compris, pèseraient plus de huit mille kilogrammes, elle devra, pendant trois mois au moins, accorder les mêmes facilités à tous ceux qui lui en feraient la demande.
42. Les prix de transport déterminés au tarif ne sont point applicables, 1° aux denrées et objets qui ne sont pas nommément énoncés dans le tarif, et qui, sous le volume d’un mètre cube, ne pèsent pas deux cents kilogrammes (200 kil.) ; 2° à l’or et à l’argent, soit en lingots, soit monnayés ou travaillés, au plaqué d’or ou d’argent, au mercure et au platine, ainsi qu’aux bijoux, pierres précieuses et autres valeurs; 3° et en général à tous paquets, colis ou excédants de bagage pesant isolément moins de cinquante kilogrammes, à moins que ces paquets , colis ou excédants de bagage ne fassent partie d’envois pesant ensemble au-delà de cinquante kilogrammes d’objets envoyés par une même personne à une même personne, et d’une même nature, quoique emballés à part, tels que sucre, café, etc. Dans les trois cas ci-dessus spécifiés, les prix de transport seront arrêtés annuellement par l’administration, sur la proposition de la compagnie. Au-dessus de cinquante kilogrammes, quelle que soit la distance parcourue, le prix de transport d’un colis ne pourra être taxé à moins de quarante centimes (40 c.).
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