du 6 avril 1892
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Une grève en Seine-et-Marne
(Dépêche de notre correspondant)
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Meaux. — Une bagarre s'est produite avant-hier soir à Crouy-sur-Ourcq.
Le brigadier de gendarmerie et un gendarme faisaient une ronde pour s'assurer que toutes les cantines du chemin de fer en construction de Trilport à la Ferté-Milon étaient bien fermées. Au cours de leur tournée ils relevèrent une contravention contre le propriétaire de l'une de ces cantines.
Ce dernier se mit alors à crier « À moi ! les gendarmes veulent m'assassiner. » Aussitôt une douzaine de « cheminots » armés de fourches, de pioches et de pelles, s'élancèrent sur les gendarmes qui durent se réfugier dans une maison voisine. Les « cheminots » tentèrent d'y pénétrer et il fallût l'intervention de nouveaux gendarmes pour les mettre en fuite.
Ces forcenés ont été arrêtés ainsi que le cantinier et sa femme et conduits hier à la maison d'arrêt de Meaux, sous bonne escorte et baïonnette au canon.
du 8 avril 1892
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FAITS DIVERS
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— Quatre cents terrassiers employés au chantier de la Ferté-Milon pour la nouvelle ligne de chemin de fer de Trilport à la Ferté (Seine-et-Marne) s'étaient mis en grève lundi matin, demandant à être payés quarante centimes l'heure au lieu de trente-six centimes.
Dans la journée, ils organisèrent une manifestation, formés en bandes, précédés d'un drapeau rouge et parcourant le pays pour essayer d’entraîner leurs camarades des autres chantiers à cesser le travail.
La brigade de gendarmerie de Lizy-sur-Ourcq, prévenue, se mit à la poursuite des manifestants, les atteignit près d'Isles-les-Meldeuses, et les dispersa après avoir fait quelques arrestations. Le calme se rétablit dans la journée d'avant-hier. Le plus grand nombre des ouvriers a repris le travail hier mercredi, et la grève peut être considérée comme terminée.