Index
Suivante
Précédente
" DÉPART POUR LE FRONT " D'ALBERT HERTER

LE DÉPART DES RÉSERVISTES À LA GARE DE L'EST EN SEPTEMBRE 1939 • PARIS MOBILISÉ

LE DÉPART DES RÉSERVISTES À LA GARE DE L'EST EN SEPTEMBRE 1939
LE DÉPART DES RÉSERVISTES À LA GARE DE L'EST EN SEPTEMBRE 1939 SOUS LE TABLEAU D'ALBERT HERTER
LA LOCOMOTIVE CRAMPTON DE 1845 A SERVI JUSQU'EN 1914
“ Paris, qui, sous les nuages de guerre, revit les heures d'il y a vingt-cinq ans, est discipliné, calme et fort. Ce furent dans les gares, avec un ordre parfait, les grands mouvements qu'ont faits les réservistes rejoignant leurs dépôts. Et l'on vit, particulièrement à la gare de l'Est, se reproduire les spectacles d'août 1914 que commémore le grand tableau du hall.

Hors cette animation d'un pays qui mobilise ses forces, la vie de la grande ville reste normale avec simplement, dans l'atmosphère et sur les visages, un sérieux conforme à la gravité des événements. La population continue de vaquer à ses tâches quotidiennes, un peu plus lourdes pour chacun depuis que le personnel des ateliers, des bureaux, des boutiques a été réduit depuis la mobilisation. Mais les bureaux fonctionnent, les ateliers travaillent, les boutiques continuent de servir leur clientèle.

On a fait partir pour des régions rurales les enfants, les femmes, autant que possible. Mais à aucun moment ces exodes raisonnables n'ont mis la moindre confusion sur les lignes et les routes.

Les avis que donne, par communiqués de presse ou radios, le gouvernement en ce qui concerne la défense passive sont suivis et l'on accepte, avec le plus simple bon sens, les mesures que les prudences municipales imposent à la population.

Paris, la nuit, a perdu ses féeries de lumière. Aux grandes illuminations nocturnes de ses belles avenues et de ses places architecturales s'est substitué un éclairage réduit ou camouflé. On ne voit plus de feux d'artifice publicitaires et, ma foi, l'on s'en passe fort bien. La circulation s'accoutume à cette pénombre trouée par les lanternes de taxis qui continuent leurs transports coutumiers d'un bout à l'autre de la ville. Une signalisation utile — une peinture blanche au tournant des trottoirs — permet aux voitures d'éviter les accidents nocturnes en même temps qu'elle invite les piétons à se garer de la circulation roulante.

Nos musées ont mis à l'abri leurs chefs-d'œuvre. A la basilique de Saint-Denis on a organisé contre les bombardements aériens possibles la protection des tombeaux des rois de France. Tout s'accomplit avec un rythme calme et dans une parfaite mesure. On lit les journaux, bien sûr, mais sans fièvre, et l'on ne s'étonne point que dans les circonstances présentes la presse soit raisonnablement censurée et que la radio d'information nous donne uniquement des faits précis, dégagés de la fantaisie vaine des commentaires. Ici et là les Parisiens montrent une fois de plus qu'ils savent se soumettre, quand c'est nécessaire, aux disciplines.

Dirons-nous même que cet air que l'on respire dans un Paris armé et sans alarme est meilleur qu'on ne l'a pu connaître en d'autres temps inquiets ? Plus de divisions, plus de discussions, mais une belle union confiante et fraternelle dans le devoir commun, qui est l'acceptation ferme d'événements dont la France pacifique ne porte point la responsabilité.

Paris, dans ces heures graves, a repris sa noble physionomie de l'histoire. Et l'image de la capitale est celle de tout le pays instantanément libéré de ses querelles intérieures, réduisant sans peine ses plaisirs et ses jeux et rassemblant ses forces, sur le signe du chef, dans le ralliement national. ”

RÉFÉRENCE